Voir l’ensemble des films qui
sortent chaque semaine tient de l’impossible. Alors on affine ses choix, on y
va sur un coup de tête, sur un coup de cœur, par le bouche à oreille ou le
bouche-à-bouche, on y va séduit par la bande annonce ou en grand fidèle du
réalisateur, on y va pour un casting, pour une belle affiche, pour un titre
aguicheur. Sur l’ensemble des films de l’année 2012, j’en ai vu 107, dont 90
dans les salles obscures et j’avoue, c’est un peu trop.
J’y suis allée pour voir la
suite et mon cœur a grincé devant les
décevants The dark knight rises , qui a re-tué
Pamela Rose et les inutiles Vérité
si je mens 3 et Underworld :
nouvelle ère. J’ai souri, un peu
niaise de nostalgie à American Pie 4, Men in black 3 et devant les jolies chorégraphies de Sexy
dance 4. J’ai
aimé le nouveau regard porté sur nos héros favoris dans The
amazing Spiderman et Skyfall, plus novateurs que le très bon mais néanmoins
recyclé Sherlock Holmes : Jeu d’ombres. Et enfin, pas vraiment une suite ni une préquelle,
malgré son scénario essoufflé, j’ai été absorbée par le spectaculaire Prometheus.
J’y suis allée pour rire aux
éclats et, parfois, j’ai été émue aux
larmes avec le délicieux Camille redouble ou le fragile
Comme des frères. Je me suis
laissée porter par la folie douce du vent dans mes mollets et la folie furieuse de 2 days in New
York. Je suis partie au Québec avec Starbuck. J’ai souri frileusement à l’amour
dure 3 ans, Sea, no sex
and sun, Dépression et
des potes et Un bonheur
n’arrive jamais seul. J’ai jubilé au
numéro de danse de Lambert Wilson Sur la piste du Marsupilami et à la très bariolée Clinique de
l’amour, mais j’ai déchanté aux numéros
de cirque des Infidèles
et à l’éjaculation de bêtise de Ted.
J’y suis allée pour l’histoire
vraie, découvrir la vie de personnages qui
ont fait l’histoire ou simplement la vie. Mais j’ai plus sombré dans l’ennui
que dans le cinéma devant J Edgar et La dame de fer. J’ai cru à un superbe fake de Sacha
Baron Cohen avec son biopic supposé de Dictator dérangé, mais la blague a tourné court et a coulé
dans le pipi-caca. Une fois la chasse tirée, place nette était faite pour des
bijoux fictifs ou documentaires sur un chanteur mythique (Marley), une femme controversée (Game Change) et une histoire incroyable de manipulation sur
fond de burgers et sodas (Compliance).
J’y suis allée pour l’acteur. Pour voir Kidman en nymphomane suante dans Paperboy,
voir Poolevorde faire ce qu’il peut dans Le grand soir, voir Eva Green en robe rouge dans le très moyen Dark
Shadows et Scarlett moulée de cuir
dans le jubilatoire Avengers.
J’y suis allée pour les beaux costumes et la fin d’année en était toute brodée. Entre le théâtre majestueux où valse Anna Karenine et la passion terreuse et sensible des Hauts de Hurlevent, difficile pour Royal Affair de se faire une place, mais Mads Mikkelsen, sa douce partenaire et le fou Son Roi y mettent du cœur. On ne peut pas en dire autant des fades Adieux à la reine, épuisants de banalité. La France a perdu ses lettres de noblesse.
J’y suis allée pour le
réalisateur, parce qu’il a un nom qui
résonne fort dans le cinéma, qui fait un sacré écho. Mais alors mon cœur,
certains ont bien du mal à le faire battre. Audiard (après un
Prophète, qui tenait plus du documentaire
que du film), nous balance un mélo indécis, un Intouchable aguicheur avec De rouille et d’os.
Le Savages d’Oliver Stone
s’embourbe dans une mélasse flashy. Quant à Resnais (Vous n’avez
encore rien vu) ou Haneke (Amour), je suis carrément partie avant la fin, prise d’un
ennui persistant.
De déceptions en déceptions,
j’ajoute aussi le dernier Disney, les mondes de Ralph, et The Secret, partis du bon pied mais par le mauvais chemin.
Daldry, Le Stephen Daldry de the Hours ou the Reader, lui aussi se casse la
gueule avec son adaptation d’Extrêmement fort et incroyablement
près, plutôt extrêmement faible et
loin derrière les deux ( ! ) longs-métrages de Cronenberg, pourtant pas en
grande forme. Un Cosmopolis
facile mais dérangeant, un peu sale, suintant, et une dangereuse
méthode tranquillement avachie sur le
divan de la psychanalyse.
Et puis il y a les réalisateurs
du genre fainéant : Gondry, Dayton & Faris, Astier, Reitman. « On
se foule pas trop, on a déjà pondu du lourd, maintenant on se contente du
correct. ». Ça donne un The We and the I plutôt frais, mais sans plus, un Elle
s’appellait Ruby un peu bâclé, un David
et Mme Hansen assez mal joué et
pourtant brillant, polémique et enfin un Young Adult réussi, mais trop vite oublié.
Il y a aussi ceux qui
bossent : Affleck (Argo),
Dupieux (Wrong), Anderson
(Moonrise Kingdom) et
Dolan (Laurence Anyways)
qui nous vendent de la pure came, un film nickel qui manque malgré tout d’un
petit plus pour être un chef d’œuvre. Un chef d’œuvre ? Holy
Motors, mais j’en ai déjà assez écrit
ici sur Carax et son génie.
J’y suis allée pourtant j’aurais
pas dû. Je n’aurais pas dû subir la prise
de vue vomitive de Rengaine, le scénario qui fait plouf de Battleship, les minauderies
bobo de Ma première fois, la
deuxième partie d’une vie meilleure (et Leila Bekhti par la même occasion), les gémissements punk de Bye
Bye Blondie, la poursuite interminable
de Sans Issue, le
labyrinthe scénaristique de La taupe, la nullité à la française du Guetteur et enfin le gnangnan assumé des
saumons dans le désert et de Nouveau
départ.
J’y suis allée par hasard et j’étais mal à l’aise. Mal à l’aise par le jeu si vrai, palpable de Rénier
et Depardieu dans Possessions, par le jeu malsain de
McConoghey dans Killer Joe, par
l’injustice criante de la prenante Chasse et de l’étrange Despues de Lucia, par le travail de l’atmosphère dans l’effrayant Sinister, le déroutant Babycall, l’insolite Deep Blue Sea, le rugueux Tyrannosaur, le solaire Matha Marcy May Marlene, le Hold up muet et froid et le super bizarre Kill
List.
J’étais mise mal à l’aise, aussi,
par la douleur silencieuse des personnages, par la mort lente d’Hélène Vincent
dans Quelques heures de printemps,
par la soumission de Miss bala ou le déni de la jeune fille de Trust.
Enfin, le pire de tous les
malaises : la sensation qu’on se moque de moi, de mon moi-spectateur. Projet X, Arbitrage et Sur la route, trois merdes que l’on déguste la tête la première
et qui finissent par nous étouffer.
J’y suis allée sans
convictions et puis… Ce n’était pas si mal.
Au galop, Des hommes sans loi et sa poussière, Moi, député, 21 Jump Street, Perfect sense et la beauté unanime d’Eva Green, 30
beats (sur le même principe de ronde
que le décevant 360), Chronicle et ses super-ados, Elles et sa fin exquise, Another Happy day et l’indétrônable Ezra Miller, Parlez-moi
de vous et la voix chaude de Karin
Viard, The descendants et
Clooney en père un peu pataud, Hunger Games, Looper et la métamorphose stupéfiante de Gordon-Lewitt.
J’y suis allée par curiosité et j’ai découvert de l’or. Que ce soit dans les
dialogues déferlants de God Bless America et Cogan, dans la musicalité envoûtante de Café
de Flore, dans le ballet de combats de
The Raid ou la puissance
de Broken, dans les
grands maux de Detachment,
dans la surprise de La cabane dans les bois, dans le duel intérieur de Take
Shelter, chaque film m’a touchée en
plein cœur, a caressé mon âme avec des mots doux, a fait dresser les poils sur
mes bras, a fait danser mes yeux sur l’écran, chaque film m’a émue, a remué en
moi la rage ou la joie. J’ai joui huit fois par curiosité.
Et pour finir par la synthèse, voici
mon top 10 de 2012, totalement subjectif, il va de soi.
1 ° Café de Flore
2 ° Broken
3 ° Detachment
4 ° Holy Motors
5 ° God bless America
6 ° Camille Redouble
7 ° Cogan / Killer Joe
8 ° La cabane dans les bois
9 ° The raid
10 ° Compliance
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