Le cinéma d’Andrea Arnold est
franc et sensible. Après le bouleversant Fish Tank, elle adapte le classique
des Hauts de Hurlevent, le traîne dans la boue et nous livre cette romance
crasseuse et bestiale dans une longue caresse, nous plonge dans une tension
amoureuse et charnelle. Arnold fait parler ses images, fait crier les regards,
et ce film contemplatif en dit long avec si peu de dialogues. Le travail du son
est remarquable, un chant fébrile remplace la musique, les respirations de
l’humain et de la nature soufflent sur cet amour suffocant. Le parti pris
esthétique est bouleversant. Gros plans des mèches battant la nuque terreuse de
Catherine, une main d’ébène longeant le flanc blanc nuageux d’un cheval au pas.
Fort d’une puissance
contemplative, Wuthering Heights souffre pourtant de cette histoire d’amour
lassante et voyeuse, de cette passion lamentable et destructrice. Les
personnages sont mal vieillis, la jeune Catherine, Shannon Beer, aux paumettes
saillantes et aux petits yeux malicieux s’anorexise en Kaya Scodelario,
squelette au nez retroussé. Mais étrangement, nous sommes pris dans cette
romance gadoueuse, entraînés par la puissance des sentiments exprimés et les
points de vue adoptés.
Laissez la rosée se poser sur vos
yeux fatigués, et savourez l’éclosion de cette réalisatrice audacieuse. Entrez
avec patience dans ce film brumeux, traitez avec délicatesse cet objet
cinématographique sensible, laissez-vous porter par les vents hurlants de cette
plaine humide.
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