Métachronique

Métachronique

vendredi 28 juin 2013

Remets donc ton slip et va jouer avec ceux de ton âge, Kal.

"Selon Parménide, l'Univers est divisé en couples de contraires : La lumière - l'obscurité; l'épais - le fin; le chaud - le froid; l'être - le non-être. Il considérait que l'un des pôles de la contradiction est positif, l'autre négatif. Cette division en pôles positif et négatif peut nous paraître d'une puérile facilité. Sauf dans un cas : Qu'est ce qui est positif, la pesanteur ou la légèreté? " M. Kundera.




De toute évidence, Nolan, Goyer et Snyder n'ont pas su trouver l'équilibre. L'homme d'acier pèse le poids monstrueux de la surenchère. Il commet les mêmes erreurs que le dernier Dark Knight Rises, se pare d'une prétention très près du corps, et balance une sauce incessante d'explosions et de combats. Mal filmés de surcroît. Snyder se ferait-il vieux? Aurait-il la tremblotte, doublée d'une sérieuse cataracte?

Passons sur le scénario insensé, le rythme épuisant, sur Loïs et le sauvetage du chien, cette tentative de dé-ringardiser Superman n'aurait pas été un échec si la modestie s'était alliée à Henry Cavill (idéal).
N'oubliez pas, messieurs, ce qu'est un Super Héros. C'est ce gosse qui soulève un camion de ses petites mains trempées, ce n'est certainement pas cet homme qui détruit des dizaines d'immeubles (et ainsi des milliers de vies) sans s'en soucier, mais qui chipote pour une petite famille menacée d'un rayon laser oculaire.

Man of steel est lourd, terriblement lourd, et pour répondre à Milan, la légèreté est bien le positif, quand bien même elle est insoutenable.

mercredi 26 juin 2013

Tout ce qui brille


Redondant. Ce bling-ring tant attendu ne ravit ni le cœur, ni les yeux…
Sofia Coppola rempile avec l’ennui, exercice périlleux réussi avec Somewhere, mais bien moins triste et profond lorsqu’il touche à des prépubères en manque d’action.
Côté casting, rien de bien étincelant. Emma Watson tente pathétiquement de se décoller d’Hermione (mais même Korine n’en a pas voulu), Israel Broussard est à limite de l’exaspération, seule Katie Chang éclaire le désert obscur de la distribution.
Succession de cambriolages, avalanche de strass, diamants et imprimés léopards, percées de cris hystérico-juvéniles… voilà ce qu’est the Bling ring quand Sofia s’écarte de ce qu’elle maîtrise pourtant si bien : le cinéma. Car en fouinant dans les tiroirs de son dernier film, vous pouvez trouver de bien jolies perles, comme ce plan séquence d’une maison violée en plan fixe, ou ça et là des dialogues excellents, souvent drôles, saisissant l’actuel à pleines mains.
Ces petites bouches vulgaires et affamées s’empiffrent de superficiel, décorent le vide de leurs vies minables par du clinquant et de l’adrénaline, un peu, beaucoup, passionnément, à la folie…

mercredi 19 juin 2013

Scientologie, j’écris ton nom.


J’entre dans un étrange magasin… On l’appelle Le Cinéma. Sur la devanture, on peut lire : Divertissements, arts et essais. Drôle d’endroit, peut-être y trouverais-je quelque chose à me mettre sous la dent… Dedans, on y trouve des produits de qualité supérieure, des mélanges étranges ou inattendus, et entre autres, bien sûr, des navets.

Une voix résonne dans le grand hall du Cinéma. « Le petit Jaden Smith est attendu par son papa au rayon médiocrité… ». A ce rayon, j’y ai vu de mauvais effets spéciaux, des monstres mal finis. Ils grognaient tout près des piles de scénarios bâclés. Je jette mon œil au sommet de l’une d’elles et, sur la première page, je lis : After Earth. Soudain, un acteur se rue sur le minuscule papier et, vaillant, le brandit avec fierté. Un jeune garçon le rejoint, mini-moi de l’acteur, ce doit être Jaden !
Dans leur caddie, ils accumulent des manuels de scientologie, de la psychologie en carton, des costumes qui changent de couleur, ils se précipitent et oublient le plus important : un peu de rythme, un réalisateur, quelques doses de suspense, un casting, une couverture de survie et une trousse à pharmacie.

Quelques mois plus tard, en tête de gondole, parmi les nouveautés, j’ai pris –curieuse- un After Earth à consommer sur place. Je suis avec un ami, nous nous installons. À nos premières bouchées, nous étions déjà écoeurés. Morale gluante (la peur est néfaste), relation père-fils à vomir (tu aurais dû mourir à la place de ta sœur, gamin), esthétique en plastique, jeu d’acteur pathétique, tout est en toc ! Un paquet de céréale sans le jouet, un kinder sans la surprise, trois œufs cassés dans la boîte de six. Ce qu’on appelle une arnaque.

On dit qu’il fut un temps où au Cinéma, chaque semaine, le réapprovisionnement était plus pauvre, mais où chaque produit avait un goût de vrai, le goût inimitable du travail bien fait.

lundi 17 juin 2013

Coffee and cigarettes…


La fumée chaude du réconfort, la gorgée amère au goût de réveil…
Oh boy est ce café que la vie ne vous laisse boire, comme une punition, comme un mauvais sort. C’est le parcours d’un garçon vers l’homme, une longue prise de conscience, drôle, absurde, une balade tendre. Tom Schilling est attachant en illustration de la jeunesse actuelle, perdue, en quête fainéante et désenchantée.
Oh boy est un croquis subtil, une parenthèse errante. Le noir et blanc photographique s’accorde au rythme de la musique, un simple petit jazz joyeux puis des notes au piano, plus tristes, plus sérieuses. Un format carré n’aurait pas détonné dans l’esthétique et la démarche. Oh boy est un film simple, aux accents savoureux de sincérité.



mardi 11 juin 2013

Des mèches rousses soufflant sur la peau en porcelaine d'une Afrique révoltée.

Ginger & Rosa est maladroit, débutant. Mais les pleurs d'Elle Fanning sont puissants, sa souffrance est honnête. Il pèse sur elle tout le poids du monde, la survie de l'humanité. Elle est étouffée d'une révolte intérieure dont seules des larmes s'échappent. Elle subit en silence et ne se libère que sur des carnets, dans des poèmes simples et sincères. 
Ginger & Rosa sont filmées par une caméra jamais intrusive malgré les gros plans, une caméra comme une mère bienveillante et protectrice. Elle protège ces deux amies, l'ange et le démon, deux adolescentes liées par la vie, la vie qui subsiste, qui pardonne, la vie vainqueur.


lundi 10 juin 2013

Bonjour les degas.


Lorsque l’on est auteur, que l’on a l’extrême chance, l’opportunité rare d’être édité (en BD comme en littérature), que l’œuvre que l’on produit soit de qualité ou non, qu’elle touche son lecteur ou qu’il passe à côté, le moindre des efforts est de la corriger. Lorsque l’on est éditeur, comment laisser passer des bulles mal conjuguées ? C’est pourtant l’erreur commise dans le Polina de Bastien Vivès, grand prix de la critique BD 2012. L’auteur devrait faire un tour du côté de chez Pivot avant de nous imposer la lecture affligeante de phrases telles que « Qui c’est qui va passé son 10 ? ».

Au-delà du pinaillage, reste la lecture. Polina est une sorte de biographie fictive, plus centrée sur la vie d’une jeune danseuse que sur la danse en elle-même et trop avare de scènes gracieuses. Vivès sait pourtant saisir le mouvement, le capturer dans des cases, faire tourner ses petites ballerines dans une boîte sans musique. Encore, encore une attitude, encore une pirouette, encore… On en voudrait encore de ces portés sensuels ! Mais Vivès tranche les duos comme le temps, nous gave d’ellipses mal assumées, se perd dans un contretemps. La danse est affaire de rythme, mais Polina n’est pas à propos de danse, il est à propos de vie, d’une vie mal rythmée, d’une vie dont on se fout un peu, finalement.

Ce livre manque d’âme, il manque de beauté. Les personnages –dessins tristes, sans détails- ont le regard vide; l’émotion est diluée dans l’encre noire.

Une BD inachevée.

mercredi 5 juin 2013

I belive I can fly...

 
Après quatre bons ratés, la série des f&f s’était regonflée de muscles et d’action avec le cinquième volet. Fini les bombasses en mini-short caressant des bolides fluo, nous assistions à des chassés-croisés dans Rio, puis à la création basique et pourtant jouissive d’une team qui en avait sous le capot. Un genre de casting pop-star avec moins de miel et plus de cambouis.
Fast five comme une gigantesque onomatopée, laissant notre cerveau sur pause, faisait du bien. Mais quand on profite de notre trêve intellectuelle pour nous assommer de bêtise, la pilule est plus dure à avaler. Aberrations scénaristiques et défi de la pesanteur, le sixième f&f n’est qu’une blague explosive. Et qu’on se le dise, assumé ou non, ce gros n’importe quoi est poussif et lisse, bien trop lisse. Retour aux rodéos, aux fesses bronzées moulées dans un skaï doré, aux histoires d’amour en guimauve et barbecues. Et l’arrivée de Statham dans une suite évidente viendra probablement enterrer le succès de la série, à qui ce sixième volet creuse déjà la tombe.

samedi 1 juin 2013

La grande bellezza. La grande beauté.


Voyageons au bout de la nuit… mais demain, où mèneront ces fêtes mondaines, ces petits trains italiens « les plus beaux », les refrains repris en chœur, où mèneront ces marches sacrées montées à genoux ?
Sorrentino filme le nulle part avec finesse et poésie. Intelligents, les dialogues emplissent de matière la vacuité de ces existences superficielles ; sublimes, les images caressent les corps et dévastent Rome. Si Fellini n’est plus, le cinéma italien vit encore, il éclabousse nos yeux d’un art proche de la perfection. Caméra mouvante, jamais brusquée par les gesticulations insensées de la mondanité que l’on nous peint. Cinéma mouvant, anesthésiant en silence les douleurs inguérissables d’un pays, le passé étouffé d’un homme.

Ce film sur le vide est pourtant si dense, si plein de désespoir et de beauté.