Métachronique

Métachronique

vendredi 29 juin 2012

Rouge sang coule sur nos mémoires.

 
Le fils, Ezra Miller, la hait. La mère, Tilda Swinton, cherche le pourquoi dans ses souvenirs. La mère est trempée d’un rouge sang en leitmotiv sans grande subtilité, mais d’un visuel riche et liant entre elles les périodes traversées, comme un fil –rouge. Le film est rythmé par un malin montage alterné, nous impliquant dans la réflexion de la mère en direct. Cinématographiquement, le sujet de leur détestable relation est traité avec réussite, mais alourdi par des métaphores un peu limite (Swinton se lave avec frénésie le sang qu’elle a sur les mains… Bon.).
Ce qui sauve le film et fait grandir notre intérêt, c’est indéniablement la performance des acteurs, chacun installé dans son rôle, possédé par son personnage. Ezra Miller est le plus sexy des enfant perturbés, jette des regards lubriques et malséants. Ezra Miller est parfait dans le rôle de Kevin, suivi de près par son mini-lui. Tilda Swinton, au visage sec, cassant, excelle en mère bizarre et malmenée. Un film…intéressant.

« C’est un roman qui est toujours dans la vie ».


 
Au-delà des confessions plus ou moins pertinentes de ces jeunes de la nouvelle génération, ce documentaire est surtout un bel éloge de la littérature, donnant la preuve par l’exemple qu’elle est éternelle, multi générationnelle, soulevant sans cesse en nous l’identification « C’est toi, c’est toi ».
Le film ponctué de lectures, intègre une histoire universelle dans un contexte réel, dans un lycée d’aujourd’hui. Si les témoignages sont parfois maladroits, d’autres se montrent justes de naturel, comme des paroles d’enfants. Nous, princesses de Clèves, affirme, avec des mots simples, l’importance de la culture dans les familles modestes, dans les zep « On a tous le même cerveau suffit de le mettre en marche et voilà c’est tout. ».
Des adolescents avec des rêves, des problèmes, des déceptions et des coups de cœur, voilà les nouvelles Princesses de Clèves.

The deep blue sea.



« You belong to me », un violon plaintif, nous voilà plongés jusqu’au coup dans les eaux profondes du romantisme. Ravivant un genre mythique, à l’ancienne, Terence Davies prend un risque incroyable. Plus culotté que the Artist, il ose le mélo en couleur, choisit l’actrice la plus gracieuse et charismatique de l’Angleterre et roule ma poule pour des pleurs et des cigarettes.
Calfeutrée dans une passion dévorante, Hester (Rachel Weiz, sublime) quitte son mari pour un ancien pilote. Mais l’homme dont elle est éperdue tue à petit feu son bel enthousiasme. À force d’inintérêt pour son désir, elle devient victime larmoyante de sa propre situation.
On ne peut reprocher à Terence Davies son implication dans le style, mais l’atmosphère un peu lourde finit par lasser. Certains instants enlevés donnent pourtant à The deep blue sea un charme incroyable, comme cette chanson par bribes murmurées finissant en étreinte dansée sur la voix de Jo Stafford. Un moment étrange de cinéma. Déroutant.



dimanche 17 juin 2012

The stone that the builder refuse...

 Alors que le cinéma actuel fourmille de biopics artificiels, il fait bon de voir que la biographie documentaire tient encore debout. Rythmé par des entretiens liés, savoureux de spontanéité, Marley retrace le parcours incroyable d’un mythe naturel. Sillonnant les thèmes de la musique, de la famille, de la politique, de la maladie, Kevin Macdonald construit un film extrêmement riche, riche en images rares, touchantes, amusantes ; un film riche en découvertes : la naissance du reggae, la culture rasta, Marley en séducteur, infidèle, Marley en père et père de peuples divisés. Ce documentaire est un hommage discret, complet, à un homme taché de clichés, un documentaire aérien que l’on parcourt au travers les verts sommets de Jamaïque, avec dans le cœur un air familier. 


vendredi 15 juin 2012

Perfect Sense



 On a day like this, we can smell the sky itself.

Belle histoire d’amour sur fond d’apocalypse, ponctuée d’une voix-off froide et pénétrante. Romance obscure que des litres de larmes et des minutes au ralenti noient dans le mélo. Eva green en aigle noir, majestueuse et sombre. McGregor dans son habit de perfection. Les seins d’Eva Green, la plénitude ; le calme lourd des seins d’Eva Green roulants sur la peau rousse d’Ewan. Ces deux êtres sont rongés par la peur de la solitude, la peur d’entrer aveuglément dans un trou noir, dans la folie, sans guide. Ce couple (intriguant de beauté) entre dans une quête démesurée des sens qu’il leur reste, où ils mordent à pleines dents dans un savon, gobent de la mousse et la recrachent en éclat de rire ; perpétuer le souvenir du sens et le laisser s’envoler au vent, vivre sa vie.

jeudi 14 juin 2012

"De tous les animaux purs, tu prendras sept paires".


Emily Blunt et Ewan McGregor font des pieds et des mains pour introduire des saumons au Yemen. Matt Damon et Scarlett Johansson réparent un zoo en quelques battements de cils. En soi, deux films aux titres ronflants de gentillesse, qu’on garde pour les dimanches gris.
Lasse Hallström nous avait habitué à des romances maladroites, mais bien menées par des acteurs délicieux (Le chocolat, Casanova). Des saumons dans le désert (Salmon Fishing in the Yemen – Ahah) fait partie de ceux-là. Il avait pourtant le charme anglais et l’accent rouquin de McGregor, les répliques jubilatoires de Kristin Scott Thomas, il s’ouvrait en posant le doigt (avec légèreté) sur des travers politiques, sur des clivages culturels... Mais la seconde partie tombe dans l’eau de rose, dans la romance prévisible, dans les grandes accolades et des vagues de bons sentiments.

 
Nouveau départ (We bought a zoo - si, si) s’assoit sur les mêmes fondations : un homme et une femme sentimentalement disponibles, que le destin va réunir dans une grande aventure, mêlant animaux, argent et humour tranquille. Après le massacre Vanilla Sky, Cameron Crowe s’est rattrapé, mais cache encore de larges failles.
Un cinéma gentillet, qui fait des ronds dans l’eau.

Le temps des copains et de l'aventure...


Moonrise Kingdom est l’épopée loufoque de Suzy et Sam, d’une fillette dérangée et d’un jeune scout évadé. À leurs trousses, le chef scout Edward Norton (génial looser) et son campement de bras cassés, les parents de Suzy, Bruce Willis en flic triste, les services sociaux, une tempête dévastatrice et l’amour.
Emprunt de poésie et de folie furieuse, cette fugue explose en mille morceaux d’humour, de beauté et d’absurde. L’image sixties est très riche, ancienne photo jaunie, sur laquelle posent des acteurs idéaux, parfaits dans leurs costumes, dans leur décor exceptionnel. Les dialogues ne sont pas en reste, ils pétillent, jaillissent d’un loufoque tendre. Seule l’émotion s’est tirée loin du film, discrètement dans son petit canoë de bois. 

vendredi 1 juin 2012

C'est caucase !




Avec ces ressources [les techniques], les hommes, à l’origine, vivaient isolés, et les villes n’existaient pas; aussi périssaient-ils sous les coups des bêtes fauves, toujours plus fortes qu’eux; les arts mécaniques suffisaient à les faire vivre; mais ils étaient d’un secours insuffisant dans la guerre contre les bêtes; car ils ne possédaient pas encore la science politique dont l’art militaire fait partie.  


Platon. Protagoras, 1967



Prometheus est une bombe. Ridley Scott s’est offert, pour ce bijou de SF, un casting explosif : la froideur impitoyable de Charlize Theron ; Noomi Rapace brûlante d’une foi à toute épreuve ; le charme plastique et impassible de Michael Fassbender ; le charisme décontracté d’Idriss Elba (le Stringer Bell de The wire) ; rien que ça pour aller explorer une planète inconnue, touts moulés dans leurs combinaisons futuristes.
Si le discours de fond est discutable, sans véritable message étoffé, s’enlisant dans l’idée poisseuse que l’étranger est toujours mauvais et destructeur, l’image est véritablement spectaculaire. La 3D s’impose subtilement, délicatement parfaite, donnant une profondeur intense à l’image et la chair de poule au spectateur. La technologie atteint dans Prometheus un niveau d’extrême réalisme. Prequel ou pas, c’est beau. C’est grand !