Métachronique

Métachronique

mercredi 25 janvier 2012

Le lys dans la Vallée


Café de Flore est une rareté sublime, un poème sexy, un superbe film à part. Le montage jouissif du son (un délice incessant) comme de l’image (couleurs et points de vue magnifiques) joue avec nos émotions. Des acteurs à fleur de peau se mêlent harmonieusement dans cette mélodie, dans ce mélo divin. Les dialogues sont délicats, frôlés d’une fraîcheur québécoise. Tout est très écrit, sans être théâtral ; on touche du bout des yeux une intense réalité cinématographique. C’est beau.


mardi 24 janvier 2012

Oberarzt


Moi qui croyait que Cronenberg était un as de la névrose, je crois que j'ai plus apprécié La Mouche que Dangerous Method.
Visuellement, l'ensemble est parfait, à la fois précis et distordu. Le trio d'acteurs est excellent. Les dialogues se défendent, mais voilà...
Où est l'inquiétante étrangeté, la tension sexuelle, la violence, la psychanalyse profonde? Tout paraît gentillet, comme enrobé d'une censure, comme inachevé. Mais voilà...
J'ai dormi la dernière demi-heure. La cause va-t-elle au film ou à ma fatigue, allez savoir!

C'est la wax que j'préfère...



Comme j’aime ces horreurs délicieusement ridicules.

Références ou pas, vous avez du sang, un scénario, du spectaculaire, des ados à la plastique aussi lisse que leur intellect, aussi lisse qu'une poupée de cire...
Avec la maison de cire, vous avez un divertissement horrifique, dégueu et visuel, presque deux heures exquises de bêtise et de sursauts, vous avez chaud, et je sais pas vous, mais moi j'adore ça!

Si le loup y était...


Je te mangerais est le jeu insupportable d’un chaperon rouge perdu dans les bois d’un loup tyranniquement sensuel. Marie, étudiante en piano emménage chez Emma, son amie d’enfance, riche fille abandonnée par sa mère artiste. Sans aucune progression, sans aucun rythme, le film s’étend dans une séduction malsaine, à l’âge où l’on ne sait pas trop. Le scénario se mord la queue, et alors que la psychologie des deux jeunes femmes aurait pu être poussée, travaillée, sobrement mise en scène, elle explose en mille morceaux ridicules pour retomber lourdement dans une mélasse de fascination et de dégoût. La musique omniprésente nous plonge dans une ambiance étrange, les dialogues sont froids, sans saveur, les actrices font leur possible -performance sans éclat-, elles deviennent l’une et l’autre antipathiques, hystériques et le spectateur, pris de malaise, préfère s’éclipser discrètement.

lundi 23 janvier 2012

Aie confiance...

David Schwimmer signe un film soigné, saignant de douleur. Trust c’est le viol d’une adolescente, filmé au travers d’un prisme de personnages magnifiquement interprétés. Trust c’est cette confiance aveugle qu’on fait à la vie et c’est la vie qui nous baise. Trust c’est un kaléidoscope d’émotions et de points de vue, de la haine mêlée à la tristesse, c’est le rire grinçant, le sourire bienveillant, c’est l’humiliation aussi, la honte, l’envie, l’amour. Trust c’est l’évolution psychologique d’une fille et son père, en face à face avec la réalité.

dimanche 22 janvier 2012

«L'amour est le problème des gens qui n'ont pas de problèmes.»


Je vais être entièrement subjective car Beigbeder, dans tout l’agacement qu’il peut soulever chez une bonne partie, reste un personnage que je trouve attachant, maladroit et paradoxalement, assez sincère quand tout le monde s’agite sur son opportunisme et son goût de l’artifice.

L’amour dure trois ans est comme ses livres, brouillon mais immensément riche d’humour, de références, d’envie. Il y perfuse une atmosphère presque théâtrale, une ambiance bordélique de débutant et se protège des détracteurs en faisant sa propre critique, cinglante d’autodérision et ne cachant pas un léger manque de confiance.

Côté acteurs, le jeu de Gaspard Proust reste à la limite de la justesse, Louise Bourgoin fait du Louise Bourgoin (mais là aussi, je suis subjective) et les seconds rôles tiennent la route.

L’amour du trois ans est comme le livre, une jolie douceur drôle et littéraire.

jeudi 19 janvier 2012

Des fois juste en claquant des doigts.


Une première fois ne se déflore dans une pièce jonchée de fleurs que si l’on roule sur l’or de nos parents. Une première fois c’est bien plus maladroit dans la vraie vie et dans la classe moyenne. Ma première fois n’était pas avec un mannequin paraissant 25 ans se faisant passer pour un rebelle de 20. Ma première fois était bercée de questionnements, de douleur, mais ce n’était pas du cinéma.

Ici, tout est prévisible, tout est trop rangé, étiqueté, tout est trop guimauve, dans un écrin d’argent et de soie. Tout est joué un peu trop faux, sauf l’amie Lilly-Fleur Pointeaux (tout en justesse) au personnage trop survolé, oublié, qui décore. Mais le couple de poupées Sarah et Zach sent la romance un peu désuète, les pannes de moto en pleine nuit, le « loup y est-tu » dans les bois, les cheveux dans le vent et les photos pour éterniser l’instant.

Ma première fois n’est qu’un voyage dans de belles images, il s’enfonce dans le luxe, entre les jambes d’un public féminin, dans le confort d’un scénario banal. Il a giclé en moi une impression de déjà-vu, un foutre poisseux de cinéma sucré.

lundi 16 janvier 2012

Parlez-moi d'amour, redites-moi des choses tendres...

Parlez-moi de vous m’a touchée. La dernière fois qu’un film m’a touchée, m’a émue comme ça, il y jouait les deux mêmes acteurs. Il y avait Karine et Nicolas. C’était Polisse et ça n’avait rien à voir.

Animé par la voix exquise de Mélina, ce qui partait comme un film gentil et léger se tord en une énigme, en tableau d’un manque familial profond, en une complexité affective.

Le film frôle parfois le grotesque sans jamais vraiment y tomber, il trouve son équilibre entre deux personnages aux caractères antipodiques, à la sensibilité extrême et au charme discret. Karine Viard n’a jamais été si bien filmée que dans ce studio de Radio-France et dans cette séquence de fin, superbe d’émotion.

mercredi 11 janvier 2012

Un biopic, quelle folie!!

Le nouveau film de Clint Eastwood est un trop long Brokeback Mountain en cravate, une histoire d’amour terne de 2h15 et -à mes yeux- la retraite qui sonne pour Léo. J. Edgar c’est du Scorsese sans rythme et sans rage, c’est soporifique d’inintérêt, d’une linéarité somnolente, c’est le portrait d’un homme répugnant de valeurs dégueulasse et l’image désaturée assombrit ce tableau déjà morbide.

Après l’inutile Au-delà, J. Edgar semble bénéficier de la bonne grâce des critiques, et le simple nom d’Eastwood suffirait à titiller la libido des Cahiers du cinéma. Alors serais-je de mauvaise foi ?

Dicaprio, depuis l’infernal Aviator, joue le même rôle. L’antipathique héros aux traits froncés, l’énervé maniaque. Quand d’autres acteurs avancent avec du charisme dans la bouteille, Brad Pitt et sa barbe grisonnante en tête de file, Léo perd de son charme juvénile et plonge dans le papa sévère et bedonnant. Quand d’autres acteurs affinent leurs choix de films avec le temps, s’essayant à de l’indépendant ou du film de genre, Dicaprio s’enferme dans des machines huilées de cinéastes consensuels.

Bref, j’ai presque dormi, j’en ai voulu à Clint Eastwood de nous servir cette purée tiède, j’ai presque détesté.


lundi 9 janvier 2012

Tout le monde debout...là-bas!


Je ne voulais pas y toucher. Pas habituée à faire les critiques de comédies.

Et puis j’ai revu Intouchables et, devant son succès improbable, je me lance.

Mais qu’est ce qui pu tant séduire le public français ? Peut-être cette jolie manière de filmer le handicap (physique ou social) avec un humour franc et une sincérité palpable. Peut-être le talent immense des deux acteurs dont la complicité émeut, amuse. La complicité des deux réalisateurs, aussi, ayant déjà prouvé l’efficacité de leur duo de dialoguistes dans nos jours heureux ou tellement proches. Peut-être ce message simple, appuyé par une histoire vraie, que l’apitoiement est corrosif, malsain, qu’un être sans pitié peut être mille fois plus humain.

Voilà en tout cas ce qui m’a séduit. Plus que les gags gras de Dany Boon, plus que la dernière comédie glaciale d’Anne Fontaine, plus que toutes ces bassesses françaises qui attirent vers elles un public non averti.

JE VAIS SPOILER


Une vie meilleure commençait bien : des dialogues engagés, la dégringolade d’un espoir, d’une entreprise, deux innocents incompris, un endettement progressif comme une descente aux enfers. Une vie meilleure était un bon drame de société, actuel, vif. Et puis la morale s’est perdue dans les bois.

J’aurais pu écrire ma déception, de voir que le personnage joué par Guillaume Canet baisse les bras, retourne sa veste alors que dans la première moitié du film il porte haut des valeurs de détermination, de courage, d’irrévérence et d’audace. Guigui, devenu papa, grondait l’enfant : « On est dans la merde, mais on ne vole pas ! ». Guigui, devenu endetté, n’hésite pas, finalement, à voler des pommes et des merguez, à cogner pour de la monnaie et s’enfuit loin de la France, laissant derrière lui tous ses problèmes pour faire du moto- neige.

J’aurais pu dire comme le scénario semble avoir été écrit par deux personnes différentes : l’une qui dénonce par un réalisme superbe, qui séduit par la franchise des faits et l’autre qui doit finir le film, résoudre le mystère de l’absence d’une mère, résoudre un problème social d’un endettement embourbé et appuyer une morale humaine. J’ai eu l’étrange impression que cette deuxième personne ne comprenait pas la première et les enjeux qu’elle avait installés, que Cédric Kahn s’était divisé en deux réalisateurs : un bon et un mauvais. Comme s’il en avait eu assez de chercher des solutions, comme si lui-même ennuyé par son film l’avait clos sur des facilités scénaristiques décevantes. La pauvre Leila Bekhti, victime d’une naïveté à la limite de l’improbable, joue la souffre-douleur honteuse derrière les barreaux. Pendant ce temps Guigui et son fiston se fendent la poire sur leur moto-neige. Bref, on oublie les soucis et on s’éclate au Canada. Tabernacle !

mardi 3 janvier 2012

Epicerie Fine


Le film est bien rythmé, Emilie Simon signe une BO idéale, empruntée de son histoire personnelle et un bel hommage aux êtres qui s’effacent. L’héroïne traverse chaque étape du deuil, bien distinctes, du bonheur à la tristesse incomprise, jusqu’à la reconstruction de soi. Parfois drôle dans la maladresse, parfois drôle dans l’écriture, aux sentiments sincères, aux acteurs convaincants, la délicatesse est peut-être pourtant trop…délicat.

L’éloge du ringard et des conventions contraste avec une volonté de faire accepter l’humain avant l’image, on ne sait plus trop quel message il faut en tirer, on est perdu dans une histoire entre la jolie romance colorée et la comédie terne et naïve. Les voix-off - comme le couple naissant Tautou/Damiens - sonnent faux. J’ai voulu y croire, en vain.

La délicatesse est un film qu’on oublie.